page d'accueil général Textes récents de Maud Tabachnik

 

Un été pourri

98° Fahrenheit. Boston suffoque.
Des hommes sont égorgés et émasculés.
Un flic beau gosse, perturbé par les femmes et sa yiddishé mamé, mène une enquête aveugle.
Un thriller où la tension et l'angoisse ne se relâchent jamais. Et donne naissance à un détective dont le nom sonne comme un piège : Goodman.

La mort quelque part

Sam Goodman est en mission à Paris.
Des crimes odieux font régner la terreur et mettent le quai des Orfèvres sur les dents.
Et beaucoup de sang sur les murs.
Petit à petit un chantage à l'échelle nationale se transforme en un bras de fer entre deux individus : le "Fou à la bombe" et le flic juif américain.

 

 

 

La mort quelque part

  ...
- Vous êtes mieux ici.
- J'sais pas ! J'avais plein de copains là-bas, de la famille aussi. Dans le bisness, tu vois ce que je veux dire ? Machines à sous, racket... de l'oseille à la pelle !
On se marre franchement. Je n'ose pas lui demander s'il a les mêmes activités ici.
- Dis-moi, l'artiste, t'as pas des soucis, toi, en ce moment ?
- Pourquoi me demandez vous ça ?
Il me regarde, et pour une fois sa bouille n'est pas fendue.
- Parce que tu sens !
- Je quoi ?
- Tu sens la mort !
J'ai la mâchoire qui se décroche et je regarde Christophe qu'a un hoquet.
- Qu'est-ce tu veux dire ? demande Christophe avec un sourire crispé.
- Ton copain, il est dans la merde, et tu le sais, répond-il. Il se tourne vers moi. La mort qui sent, c'est pas toujours pour toi, c'est autour de toi.
Je ne réponds pas, parce que j'en suis incapable.
- Ecoutes, dis pas de conneries, s'énerve Christophe, tu vois pas que tu es chiant par moments ?
MortSubite me fixe de nouveau et ses yeux se plissent.
- La mort peut aussi sauver, dit-il.
Je regarde autour de moi. Les cousins sont partis sans que je m'en aperçoive. Christophe fixe MortSubite, et moi je me demande si je tourne dingue.
- Tu sais chez nous qu'on joue avec la Mort ? Il s'est penché vers moi et me regarde de ses gros yeux globuleux. La Mort faut pas en avoir peur, la Mort peut être une complice.
- Arrête avec ça ! dit soudain Christophe.
MortSubite le considère sans rien dire. Il lui pose son énorme patte sur sa main qu'il engloutit littéralement.
- Toi, mon frère, la Mort n'est pas ta complice, mais elle est ta compagne... une compagne exigeante, avec qui tu dois vivre chaque jour... et qui t'effraie de moins en moins au fur et à mesure que tu la connais mieux. Quand elle viendra, tu l'accueilleras comme une amante, parce qu'elle t'apportera la paix.
Il n'y a plus personne dans le restaurant. J'ai même l'impression que les lumières ont baissé.
Christophe et moi, on écoute ce géant qui nous parle de la Mort comme il le ferait d'une amie. Et je ne moufte pas.
Il se tourne vers moi, et je m'aperçois, stupéfait, que ses cheveux sont tout gris et que je ne m'en étais pas rendu compte; que sa peau est burinée comme celle des vieux nègres qui ont passé leur vie dans les plantations, sous le soleil, le vent et la pluie; que ses dents qui m'apparaissaient formidables sont jaunes et ébréchées.
Il pose ses lourdes mains sur mes épaules, me fixe, me sourit, et, bordel de Dieu ! ses cheveux crépus sont noirs comme le jais, sa figure est lisse comme celle d'un enfant, et ses dents ressemblent à un clavier de piano !
- Je peux avoir un cognac ? je demande en chevrotant.
- Un cognac français ? C'est pour les femmes en couches ! Laisse-toi faire !
Il se lève et revient avec une bouteille qu'il a prise derrière le bar.
- Tiens, avalez ! El la vie va couler dans votre bouche comme le vagin de votre chérie !
La comparaison est excessive, car la première gorgée m'arrache une bonne moitié de langue et de palais.

 

 

Un été pourri

  ...

Il n'avait pas l'habitude de ce genre de fille et comprit qu'elle n'était pas sa pointure.
Cette frustration le mit en colère et il eut brusquement envie de la forcer. Il fit une dernière tentative.
- Alors, on va boire un verre quelque part ?
Mais en le proposant il sut que c'était fichu. Jamais la fille ne lui céderait.
Sa fureur monta d'autant plus vite qu'elle était alimentée par les litres de bière ingurgités depuis le matin.
Il lui attrapa le bras, mais elle se dégagea aussitôt.
-Lâchez-moi, espèce d'ivrogne !
C'était une injonction, rien d'autre, et ce ton de mépris rendit Mort fou furieux.
Cette pétasse la ramenait vraiment trop. Pourtant, il était certain que comme les autres elle adorerait se faire ramoner.
- Dis donc, toi, grogna-t-il, t'arrêtes de faire ta mijaurée ?
- Foutez-moi la paix, dit-elle la voix terne, vous puez ! Vous me rencontrez peut-être, mais ça ne vous donne aucun droit sur moi.
Mort rigola. Evidemment, le fait qu'elle travaille dans le coin, il s'en tapait ! Mais ça ne l'empêchait pas d'être bandante !
Il la colla brutalement contre le mur et ses mains s'accrochèrent à ses seins.
- Laisse-toi faire ma jolie, y'a personne dans c'te putain de rue, et t'as vraiment le plus joli cul qu'on puisse voir !
Elle se débattait en silence, l'expression tordue de dégoût; cherchant à échapper à la bouche malodorante, au sexe durci pressé contre le sien.
Elle le repoussa une fois, avec la seule force des bras, et Mort recula devant la haine qui défigurait le visage si joli de la fille.
- Ben toi, ma salope, va falloir te mater ! gronda-t-il en l'immobilisant.
Mais elle se dégagea et le frappa violemment à la base du nez. Il en vit trente-six chandelles et perdit la tête.
Il se jeta sur elle les bras levés, décidé à la tabasser de ses lourds poings d'homme habitué aux durs travaux.
Elle esquiva d'un brusque retrait du buste, mais trébucha sur ses talons.
Il l'empoigna en l'insultant salement, hors de lui qu'une fille le frappe, lui qui dans sa jeunesse faisait plier les jarret des jeunes taureaux.
Ses mains se rapprochèrent de la gorge de la fille et il crocha ses doigts autour de son cou, s'appuyant de tout son poids sur elle pour l'empêcher de l'atteindre avec ses genoux.
Ils se battaient comme deux voyous, cherchant à se faire le plus mal possible mais Mort sentit qu'elle faiblissait sous l'étouffement.
Il accentuait sa pression quand il sentit sa tête tirée en arrière par les cheveux.
- La salope ! ragea-t-il. Je vais la tuer !
Soudain il ne pensa plus. Quelque chose venait de se passer dans sa gorge.
Un froid abominable, coupant et glacé qui le prit sous les mâchoires.
Il eut une fraction de seconde l'impression folle de tomber dans un vide si noir et si profond qu'il bascula sur le côté.
Il mourut sans savoir comment.

 

Maud Tabachnik

  Née à Paris

où elle vit et écrit toujours.

En raison d'une accidentelle et malencontreuse homonymie avec un certain

chef d'orchestre,

vous ne pourrez la joindre que par Email : maudtabachnik@usa.net

A propos de Maud...

Maud Tabachnik s'est mise à écrire sur le tard. Non qu'elle n'est rien eu à dire auparavant, mais l'expression écrite ne fut pas ce besoin premier et vital qui sert d'exutoire à tant de jeunes auteurs. Ecrire permet, par contre, à la maturité de toucher une audience plus large. Et Maud, qui n'est pas une dentellière, s'est retrouvée sur le devant de la scène du polar noir contemporain français et, avec quelques consœurs, a investi la place en coup de vent.

Publications

La vie à fleur de terre (Edition xxx, 1990, collection Sueurs froides)

Un été pourri (Editions Viviane Hamy, 1994, collection Chemins Nocturnes) ISBN 2-87858-052-4

La mort quelque part (Editions Viviane Hamy, 1995, collection Chemins Nocturnes) ISBN 2-87858-069-9

Socquet, passeport 95-96 (Editions Fragments)